Présentation du catalogue de l'exposition
Par NAZIH KHATER
Concret,
Simple,
Défini,
- Nadine Abou Zaki sculpte net, clair, précis, avec insolence froide et exigence sans appel; presqu’a distance; comme manipulée; ou sous contrôle; comme habillée; avec des gestes comme définitifs; en passionnée de rigueur récusant toute complicité qui dévergonde; en géomètre des formes simples, lisibles, définies; en inconditionnelle des lignes saines qui, droites ou courbes, déterminent sans ambiguïté aucune des volumes concrets, stables, et épanouis; jusqu’a croire que Nadine Abou Zaki rêve de construction puérile, d’architecture innocente.
- Et pourtant, c’est la Pierre et le bois que Nadine Abou Zaki taille, matériaux à peau et à muscles, veinés, tendus, avec caractère, presque réfractaire mais capable aussi de grande docilité; taille que Nadine Abou Zaki pratique à vif de corps, en coupe tranchée, comme planifiée d’avance; comme sous décision volontaire, avec vigueur, entêtement, calculée, mais le tout équilibré avec une spontanéité désarmante, par une coordination inventive entre richesse du regard et sobriété du geste.
- Le langage dépouillé, la phrase courte, le vocable sobre, Nadine Abou Zaki concilie comme sous voile, avec une sorte de pudeur sous soupçons, raccourci et insolence. N’ayant point de récit à raconter ni a soi ni aux autres, elle s’adonne aux plaisirs à la fois inventifs et ambigus, de façonner un univers en double d’elle-même. C’est à dire en une mise en abstrait du moi comme écho d’un état d’âme en mal d’identité. En ce sens, sculpter pour Nadine Abou Zaki prend la forme d’un acte total se référant par ses matériaux naturels et traditionnels et presque archaïques, aux fondements même des hautes montagnes du Chouf et au sens spirituel d’une telle appartenance.
- S’y ajoute une imagination sourde, sous-jacente, comme pudique, perceptible seulement au niveau de la grande mobilité conceptuelle inhérente à la gestation de l’œuvre. Ce qui apparaît à prime abord comme répétitif se révèle bien en-delà, autre et multiple. On est presque étonné et séduit une fois en plein milieu d’œuvres si semblables et si différentes, et toujours pleines qu’on dirait gonflées jusqu'à l’éclatement, regorgeant de santé, sous peau lisse, comme en plein air, monumentales, comme un chant épanoui de joie et de soleil.